Le texte « interpellations protestantes sur l’Assistance Médicale à la Procréation et la Gestation Pour Autrui » a été validé par le conseil de mars de la Fédération protestante de France et présenté au CCNE (Conseil consultatif national d’Ethique) dans le cadre des états généraux de la bioéthique menés en 2018.
A propos de la commission Ethique et société de la FPF :
La commission Ethique et société est une commission du conseil de la FPF. Elle a pour mission de mettre à disposition des membres des éléments de réflexion sur les questions sociétales relevant soit d’une actualité où le protestantisme français est sollicité par la société civile ou les pouvoirs publics, soit de questionnements plus récurrents et fondamentaux qui se posent dans un monde en mutation.
Elle est composée de personnalités disposant d’informations et de compétences diverses afin de proposer un regard varié et éclairé dans des champs tels que l’économie, l’écologie, la politique, l’éthique sociale, la bioéthique…
Elle organise régulièrement des colloques et publie des actes afin d’approfondir certains sujets sociétaux.
Composition de la Commission Ethique et société :
Président : docteur Jean-Gustave Hentz (UEPAL)
Représentante du conseil de la FPF : pasteure Emmanuelle Seyboldt (EPUdF)
Membres de la commission : Bernard Brillet (EPUdF), Luc Olekhnovitch (UEEL), Louis Schweitzer (FEEBF), Edith Tartar-Goddet (EPUdF), Jean-Paul Willaime (EPUDF).
Membres de droit : pasteur François Clavairoly, président de la FPF ; pasteur Georges Michel, secrétaire général
SOMMAIRE
Présentation résumée
- I) Une posture chrétienne et citoyenne
- II) Un ancrage théologique protestant
III) Possibilités et limites de la médecine reproductive
- IV) Positions
Présentation résumée
- I) Une posture chrétienne et citoyenne
1) Ces interpellations protestantes en bioéthique, comme celles en éthique sociale et en éthique environnementale, reposent sur la conviction que la vie est un don de Dieu, que l’être humain est un être en relation, qu’il faut se soucier de la protection des plus faibles et ne jamais oublier la justice sociale.
2) Les protestants participent au débat sociétal sur l’AMP et la GPA non pour défendre une position qu’ils voudraient imposer à la société mais pour contribuer, à côté et avec d’autres, à la recherche de solutions respectant notre commune humanité et les droits de l’enfant.
3) Les protestants souhaitent que le débat démocratique sur ces questions sociétales respecte non seulement le droit à l’opinion dissidente, mais aussi le droit à ce que les désaccords avec l’opinion majoritaire ne soient pas d’emblée disqualifiés comme « réactionnaires ». Ils adressent à la société et aux autorités ces interpellations dans un esprit de liberté critique par rapport à tous les lobbies. Le possible n’est pas forcément le souhaitable et il n’est pas forcément légitime de répondre à tous les désirs.
4) Sur l’extension de l’AMP et sur la GPA, l’opinion des protestants est très partagée avec des majorités et des minorités significatives dans chaque catégorie de répondants. L’état de l’opinion sur ces questions, que ce soit celle des protestants ou celle des Français, est utile à connaître mais elle n’a aucune valeur normative.
- II) Un ancrage théologique protestant
5) Le protestantisme récuse aussi bien une éthique purement naturelle selon laquelle « ce qui est, est ce qui doit être » qu’une éthique technicienne selon laquelle « ce qui est faisable est ce qui doit se faire ».
6) A la lumière du témoignage biblique et de ses reprises au moment de la Réforme, nous affirmons que la liberté ne se confond ni avec l’individualisme sans limites, ni avec la loi de l’offre et de la demande qui aboutit à la loi du plus fort. La liberté ne peut se vivre que dans l’amour de Dieu et du prochain.
7) La théologie protestante insiste sur le fait que le but du mariage est une relation conjugale d’amour et non seulement de procréation. Les enfants sont une grâce de Dieu faite au couple et non un dû. Dans les Ecritures, il est aussi question d’une stérilité choisie, féconde pour le Royaume de Dieu.
8) Dans la Bible, il est question de maternités et de paternités spirituelles et non charnelles, d’adoption choisie, librement consentie.
9) Il est important d’évaluer les techniques de procréation et leur emploi à la lumière de leur capacité à préserver ou non le respect des liens humains de couple et de filiation qui nous tissent.
III) Possibilités et limites de la médecine reproductive
10) Plusieurs techniques permettent de répondre à la détresse de couples hétérosexuels inféconds. Nous saluons les avancées de la médecine pour traiter l’infertilité et ne rejetons pas de manière absolue les techniques qui permettent ces avancées.
11) Mais quelques faits et questions nous interpellent :
– à chaque tentative de fécondation in vitro, seulement 18 à 23 % réussissent (ne pas créer de faux espoirs) ;
– les FIV peuvent exposer les femmes à des effets secondaires de gravité variable ;
– il y a des causes sociales à l’augmentation de l’infécondité ;
– faut-il encourager la « congélation sociale » en permettant aux couples de repousser l’âge d’avoir des enfants ?
– quelles sont les conséquences sur le bien-être de l’enfant du découplage des parentalités génétique, biologique, sociale et légale ?
– les diagnostics pré-implantatoires ne sont-ils pas en train d’évoluer sur une pente glissante vers l’eugénisme ?
– face à la pénurie de dons de gamètes, faudra-t-il abandonner le caractère volontaire, gratuit et anonyme de ces dons ?
– comment gérer la tension entre le principe de l’anonymat des donneurs et le droit de l’enfant à connaître ses parents biologiques ?
12) En conséquence de ces constats et questions, la commission pense que la FIV et l’insémination artificielle ne devraient être utilisées que pour des raisons médicales valables et non comme arrangement technologique de problèmes sociaux.
13) La médecine reproductive assiste et soigne des couples biologiquement infertiles, elle est réparatrice d’une infertilité biologique. Doit-on encourager par la loi l’évolution vers une médecine visant à satisfaire des souhaits, à répondre au désir d’enfant de personnes dans des situations particulières (femmes célibataires, couples de femmes) ?
- IV) Positions
14) La commission est réticente à l’ouverture de l’insémination artificielle à des femmes célibataires ou à des couples de femmes qui ne sont pas infertiles. Il nous paraît en effet dangereux d’encourager la fabrication d’enfant à la demande et les situations qui privent volontairement un enfant de son père et pourraient l’exposer à des risques psychologiques et à des discriminations sociales. Il en va également de notre responsabilité à l’égard des générations futures.
15) La commission s’oppose à la GPA parce qu’elle paraît nier le lien biologique entre la mère gestatrice et l’enfant, parce qu’elle risque de développer la commercialisation de la reproduction et d’exploiter les femmes donneuses d’ovules ou mères de substitution, parce qu’elle mettrait les enfants dans une situation ambiguë.
Texte complet sur le site de la FPF : www.protestants.org